Pascaloup de Savoie

La revue Textes et Documents pour la Classe

attaque le mois de février sur les chapeaux

de roue, en rendant hommage à Albert Camus,

ce Professeur d'inconfort.

Pour le centenaire de sa naissance,

il faut aussi se souvenir de son dernier jour.

C'était le 4 janvier 1960. L'auteur de L'Etranger

avait pris le temps de déjeuner à Sens,

à l'hôtel de Paris et de la Poste, à deux glas

de la Cathédrale Saint-Etienne, qu'il me fut donné  

de contempler entre 2005 et 2010.

En compagnie de la famille Gallimard

(Michel, sa femme Janine et leur fille Anne),

Camus monte à bord d'une Facel Vega.

Il s'agit de rallier Paris au milieu de l'après-midi.

Le neveu de l'éditeur Gaston Gallimard, 

s'installe au volant ; notre écrivain a pris la place

du passager avant...

Soudain, peu après Pont-sur-Yonne, la voiture

de sport vient heurter un premier arbre,

avant de s'écraser contre un platane...

Janine et Anne s'en sortent incroyablement, 

 Michel Gallimard décédera six jours plus tard,

Albert Camus est tué sur le coup.

D'aucuns s'autorisent à penser

que le livre est par trop statique

pour retenir l'attention d'une génération

en proie au rythme médiatique.

Nous sommes encore nombreux

à lutter contre cette "fuite des cerveaux"

et à considérer que les CDI ne devraient

pas devenir en quelque sorte des "musées

de feuilles mortes", mais il nous faut bien

aussi composer avec la sève d'autres supports

(tablettes, liseuses...).

Reconnaissons également que les e-Books

peuvent procurer un certain confort de lecture

et faire le lien dans leurs pages avec d'autres

images... Mais peut-on concilier surf numérique

et mémoire d'un classique ? Un lycéen lisant

ainsi "le Père Goriot" perdra-t-il le fil du texte ?

Il y a là comme un doute que je ne lèverai pas.

Admettons pourtant que notre connaissance

de la pratique des jeunes internautes

peut être à la ressemblance d'un dictionnaire

d'idées reçues...

Il faut de tout pour faire un monde qui évolue.

En situation d'urgence humanitaire,

réduire la souffrance est prioritaire,

et l'on peut considérer alors

que la volonté farouche de survivre

peut faire l'impasse sur le livre...

Mais Bibliothèques sans Frontières

souligne à juste titre que l'accès

à l'information et à la culture

participe de la guérison des plaies

et du retour de l'espérance.