Pour "le Figaro littéraire", l'essayiste Alberto Manguel
explore la nature du lien entre les livres et le monde.
Il avance que l'organisation d'une bibliothèque
personnelle en dit beaucoup sur son propriétaire,
qu'elle s'apparente à une "autobiographie", laquelle
devient "lettre morte" quand ce fonds privé est par
exemple transmis à une bibliothèque publique :
le classement adopté par une personne est rarement
le classement utilisé pour le repérage de tous.
Une autre idée intéressante, celle de la censure
habillée de la masse des ouvrages publiés :
" Si vous voulez empêcher les gens de lire un
livre, il ya deux façons de procéder. Soit vous
faites retirer tous les exemplaires de ce livre
des bibliothèques, soit vous les dissimulez
sous un déluge de volumes qui ne méritent
pas le nom de livres. On l'observe aujourd'hui.
Une société de consommation ne peut pas
supporter la réflexion qui peut naître d'une
lecture profonde. Pour transformer les lecteurs
en consommateurs, c'est-à-dire en individus
qui ne réfléchissent pas, on sature donc les
espaces commerciaux d'objets qui ressemblent
à des livres. De cette façon, on détruit les vraies
librairies et on fait disparaître les oeuvres véritables
sous des piles d'ouvrages sans valeur."